Hangar du chantier naval du Guip

Au Chantier du Guip, sur l’Île-aux-Moines, on répare et on fabrique toujours des bateaux en bois. Voyage en images au cœur d’une aventure humaine et patrimoniale qui dure depuis près de 50 ans.

Il fait doux ce matin d’hiver à l’embarcadère de Port Blanc. À bord de la navette, quelques habitués quittent le continent pour l’Île-aux-Moines. La traversée dure à peine cinq minutes, le temps que la magie opère. Comme dit le président de l’Association pour un Sinago Îlois, Gilles Cohen, “dès qu’on pose le pied sur l’île, on laisse ses problèmes derrière soi”. Cap vers le sud de l’île où trois hangars abritent le chantier du Guip, créé en 1976 par Francis Duwez. Son but : fabriquer et réparer des bateaux en bois typiques du golfe. Cinq années plus tard, il passe la barre à Yann Mauffret, charpentier de marine. “Quand le chantier a été créé, c’était le début du revival des bateaux du patrimoine et d’un grand mouvement pour la culture maritime”, raconte ce dernier. Même si de nos jours, le chantier principal est à Recouvrance, à Brest, où 80 % du chiffre d’affaires est réalisé, Yann est particulièrement attaché à l’anse du Guip : “On a toujours fait attention à garder notre site sur l’Île-aux-Moines. C’est notre histoire, une histoire au service des bateaux du patrimoine local comme les guépards et les sinagots.”

Deux sinagots, les Trois Frères et le Crialeïs, se font actuellement refaire une beauté dans le hangar principal du chantier de l’Îles aux Moines. Des bénévoles de l’Association pour un Sinago Îlois sont venus bricoler sur le Crialeïs toute la journée. Ils s’entretiennent gaiement sur l’avancée des travaux avec les charpentiers du chantier. “Le Crialeïs – qui est aussi l’ancien nom de l’Île-aux-Moines –, c’est notre sinagot, on l’utilise du printemps à la fin de l’été pour faire des sorties dans le golfe et faire profiter les gens de ce bateau hors du commun”, explique Gilles avant de replonger, ponceuse à la main, dans la coque caractéristique du sinagot.

Tandis que les bénévoles rabotent, peignent et vaquent à toutes sortes de petits travaux, les charpentiers du chantier s’occupent du gros œuvre. “Là, je travaille sur la bande molle des Trois Frères pour présenter son étrave, explique Jean, 27 ans, caché derrière son masque et ses lunettes de protection dans l’atelier métal. Je suis au Guip depuis un an et demi, j’adore travailler ici, c’est riche, toujours différent. Il n’y a pas vraiment de méthode, à chaque fois qu’on veut réaliser une pièce, c’est toujours un cheminement.” Charlotte partage ce sentiment de richesse, elle est aussi charpentière de marine et travaille sur la varangue d’un cotre : “On a la chance de travailler sur des super bateaux dans un lieu magique et on est bienveillants les uns envers les autres, ça tire tout le monde vers le haut.” D’ailleurs, à l’heure du déjeuner, les employés du chantier mangent tous ensemble dans la cuisine commune. Emmanuel Appéré, responsable du chantier du Guip depuis mai 2022, fait aussi office chef cuistot de la troupe ! “Je suis aussi charpentier de marine. Quand j’ai su que le chantier de l’Île-aux-Moines rencontrait des difficultés, je me suis dit : ce n’est pas possible, un tel chantier ne peut pas fermer…” Yann lui propose alors de relever le défi et de prendre sa direction, il accepte et, près de deux années plus tard, le chantier a le vent en poupe. De futures embauches sont même à l’ordre du jour. “J’ai fait comme j’ai pu pour que ça continue”, lance-t-il modestement, les yeux rivés sur ce chantier plein d’histoires et de savoir-faire qu’il qualifie de “plus beau chantier du monde”.

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