Par Mickaël Demeaux
En 1964, le monde entier découvre un jeune marin, officier de la Royale, après sa victoire dans la Transat anglaise. Éric Tabarly rentre dans la légende et sa mémoire reste bien vivante, particulièrement à Lorient.

Il est toujours là. Depuis 2012, composé d’une impressionnante mosaïque de plus de 10 000 photographies en noir et blanc d’habitants du territoire, son gigantesque portrait orne une partie des larges murs bétonnés du bloc K2 de “La Base” de Lorient.
Qu’il vente, qu’il pleuve, qu’il fasse soleil, son célèbre visage carré contemple sans cesse les promeneurs du dimanche jaloux d’aventures, les marins professionnels fous de régates et les skippers tourdumondistes en quête d’eux-mêmes et de records, tout en gardant un œil sur ses Pen Duick amarrés à la place qui leur est réservée sur les quais monumentaux de la Cité de la Voile qui porte son nom. C’est là, plus qu’ailleurs, que son âme trône intensément, où sa figure rappelle à la Bretagne et à la France qu’Éric Tabarly est, comme la mer, éternel.

Penn Duick II
Le matin des origines
Tout a été dit et écrit, ou presque, sur Tabarly. Son amour profond, simple et franc pour les bateaux. Ses exploits à bout de souffle. Ses performances erratiques. Son génie technique et inventif. Son tempérament d’ours solitaire. Sa communication hésitante. Sa camaraderie granitique et authentique. Sa fidélité rustique. Sa persévérance divine. Sa mort, déchirante.
À intervalles réguliers, lors de nouveaux exploits ou au moment des grandes courses océaniques, les spécialistes maritimes et celles et ceux qui ont bien connu et admiré le mythe national aiment à rappeler combien il a apporté à la progression de ce sport et de cette culture. Et ils ont raison de le faire. Comment ne pas raconter, encore et encore, les rudes chevauchées victorieuses de Pen Duick III ? Comment ne pas être impressionné par l’incroyable Transat de 1976 avec Pen Duick VI ? Comment ne pas être éberlué par le développement du trimaran à foils qui font voler les navires au-dessus de l’eau à des vitesses jamais atteintes ? Comment ne pas être subjugué par les lignes si élégantes de Pen Duick ? Certes, tout n’a pas été parfait au cours de cette vie d’homme, mais tout cela reste si beau et puissant. Et parfois, encore, inégalé.
Mais la plus belle part, chez Tabarly, celle qui est la moins contée, on la trouve sans aucun doute dans celle des débuts, dans ce moment précis où lui, l’inconnu venu de nulle part, décide de franchir le pas, de se lancer dans la cour des grands, celle des Anglais, et de tendre tout son être vers ce seul objectif : la Transat anglaise entre Plymouth, dans le sud de l’Angleterre, et Newport, dans sur la côte est des États-Unis. 1964, la naissance d’une légende, le matin des origines.
La suite dans le numéro 267…



