Myriam Guillevic : le breton vannetais en habits du dimanche
Elle n’a pas commencé sa vie professionnelle en tant que professeure. Après des études de droit, Myriam Guillevic a travaillé à la Maison de la Nature de Vannes. Mais, petit à petit, sa curiosité l’a amenée vers le breton que lui refusait de parler sa grand-mère maternelle. Elle a pris des cours, a passé des diplômes pour devenir professeure de collège, de lycée, et enfin de faculté… en travaillant le chant du Vannetais.
Guillevic : un grand oncle poète, une famille qui aime la littérature
Son enfance ? Une mère qui épluche des petits pois en rythme avec les vers de Phèdre écrits par Racine… Le frère de son grand-père s’appelait Eugène Guillevic, le grand poète de l’ellipse et des menhirs de Carnac. Peut-être est-ce celui qui lui a donné le goût d’écrire ? Elle ne parle pas beaucoup de lui, mais il est là pour le goût de la lecture, de la créativité, de la curiosité.
Son père ne parle pas breton, ne sait pas danser. Qu’importe, il est passionné par la culture bretonne au point de présider le cercle celtique de St Nolff pendant quelques années.
Les années de formation : le breton par le chant, la rencontre, le jeu…
Myriam apprend le breton aux cours du soir animés par Gwenael Morio et Gwenn Huon, dont les exercices par le jeu lui ouvrent tout un monde. Puis, ce seront les stages de Kamp etrekeltiek ar vrezhonegerien, Après deux ans, c’est elle qui vient donner des cours du soir à Vannes, la « meilleure façon d’apprendre », dit-elle. Après avoir travaillé à la mairie, elle devient enseignante, d’abord à Plouay, puis à Lorient et Hennebont, pour terminer sa carrière de professeure du secondaire à Lanester, au collège Henri Wallon et au lycée Jean Macé.
Ces vingt années d’enseignement lui laissent le temps d’organiser des concours de haikus et de littérature, d’écrire en ateliers des articles pour l’hebdomadaire Ya ! Et Myriam concourt par ailleurs avec ses élèves. De belles années, avec un échange pédagogique fructueux entre l’enseignante et ses lycéens. Elle les soutient dans leur écriture, relit, corrige, améliore avec eux le travail, tout en breton. En 2013 et 2014, Mael Poulossier et nombre de ses élèves vont voir leurs livres édités et primés dans les deux collections Priz ar Vugale et Priz ar Yaouankiz, deux fois de suite pour Mael, plébisicité par plusieurs centaines d’élèves de sixième et de cinquième !
Pour autant, elle trouve encore le temps de lire quatre romans par semaine, intéressée par la littérature en français, anglais et breton. Et à force de lire, de comparer, de se passionner… elle commence un jour à écrire : des chansons, des histoires, des poèmes..
Chanter, composer et étudier les chansons du Vannetais
Myriam a toujours été intéressée par le chant et leur origine, elle qui chante en kan ha diskan depuis des années. Elle s’interroge : pourquoi une chanson comme « Me zo ganet e kreiz ar mor » a-t-elle rencontré pareil succès ? Comment a-t-elle été diffusée ? Comment les prêtres, les personnes qui ont composé les chants ont-ils parlé d’eux-mêmes comme pour la chanson « An hini a garan » du père Oliero, par exemple ? Et comment savoir si ce sont des hommes ou des femmes qui ont composé, quand la plupart des titres est anonyme ?
Comment les chansons ont-elles traversé les siècles ? Qu’est-ce qui les a rendues si populaires, si connues ? Elle collecte, compose, les premières pour les spectacles du Cercle Celtique de Vannes ; puis une douzaine de chansons pour Erik Marchand et d’autres chanteurs comme Fañch Oger, Erwan L’Herminier…
Et demain ? L’avenir se dessine…
Sa thèse lui a donné l’occasion d’interroger des gens et cela lui a permis d’aller plus loin. Elle la soutient en 2018, sous la direction d’Herve Bihan, de l’Université Rennes 2 qui l’embauche trois ans plus tard. C’est « un métier où je suis plus souvent seule, il n’y a pas de salle de profs ». Avec le Celtic BLM (exit l’ancien laboratoire CRBC-Rennes), elle peut échanger avec des chercheurs interceltiques. Pourquoi n’y a-t-il pas eu de professeure de breton depuis le début de l’université rennaise ? Elle en sourit : « dans les autres départements de la fac, il y a beaucoup de femmes. Les choses sont en train de changer, c’est bien ».
Avec Gwendal Mevel, elle traduit aujourd’hui une série de contes des pays celtiques du XIXe siècle. Et il lui reste des chansons à composer… Vous avez compris, l’insatiable curiosité de Myriam est en quête de perles pour continuer à nous surprendre !