La parution récente du livre Toxique, des journalistes Sébastien Philippe et Tomas Statius, fait ressortir le dossier, ô combien brûlant, des essais nucléaires dans les atolls de Mururoa et Fangataufa entre 1966 et 1996. Les investigations qu’ils ont menées auprès des habitants de Polynésie et leur étude scrupuleuse des documents déclassés du ministère de la Défense ont permis de dévoiler la réelle dangerosité des retombées radioactives sur les populations. Si d’autres avant eux ont dénoncé les effets dévastateurs de ces explosions atomiques en atmosphère, comme Bruno Barillot, responsable de l’Observatoire de l’armement, certains n’ont pas hésité à partir protester dans le Pacifique sur la zone des tirs. Gilbert Nicolas faisait partie de ceux-là.
Le Quimpérois a rejoint l’équipage du voilier Fri, en Nouvelle-Zélande, pour un périple à travers le Pacifique vers l’atoll de Mururoa. Gilbert Nicolas est pasteur anglican et vit avec sa femme Marie à Quimper. Il avait 12 ans en 1945 quand les bombes atomiques ont explosé à Nagazaki et Hiroshima. Très marqué par l’ampleur des destructions et la dangerosité de l’arme nucléaire, il n’aura de cesse, toute sa vie, de s’y opposer. Son engagement pour la non-violence et la défense des libertés fondamentales, il le partage avec sa femme. Ils sont de tous les combats.
En 1972, abonnés à la revue Peace Média, ils suivent une première opération anti-nucléaire, qui avait regroupé des militants partis en bateau s’interposer sur la zone des explosions nucléaires américaines aux îles Aléoutiennes, arborant sur une voile le mot “Greenpeace”. C’est le début de la célèbre organisation internationale, née de la contestation des essais nucléaires.
Barry Mitcalfe, son initiateur, souhaite renouveler l’opération dans le Pacifique sud et recherche à l’époque un navire servant de navire-mère ravitailleur pour une flottille qui irait, par une action non-violente, s’opposer aux essais nucléaires atmosphériques mis en place par le gouvernement français, à Mururoa. C’est alors qu’il tombe sur le voilier Fri, arrivé deux jours plus tôt. Le capitaine David Moodie accepte mais souhaite prendre plusieurs mois pour préparer son bateau et constituer un équipage. Ayant eu vent du projet, Gilbert Nicolas veut concrétiser son engagement anti-nucléaire et s’embarquer dans l’action.