La Ligue française pour la protection des oiseaux voit le jour le 26 janvier 1912, d’abord en tant que sous-section de la Société nationale d’acclimatation de France. Albert Chappellier, ingénieur agronome et préparateur à l’École pratique des hautes études (faculté des sciences), même s’il n’en était pas à l’époque le président, est considéré comme le véritable fondateur de la lpo. C’est lui qui est à l’initiative de la création de la Réserve des Sept-Îles afin de protéger les Macareux moines, qui étaient alors des trophées de chasse. C’est ce macareux qui est naturellement devenu l’emblème de la lpo, qui gère aujourd’hui sept centres de soins de la faune sauvage en France métropolitaine.
Parmi ces différents centres de soins, on trouve la station de l’Île-Grande à Pleumeur-Bodou, ouverte en 1984, qui regroupe, outre l’espace de soins, une maison de la nature au sein de laquelle une muséographie renseigne le public sur l’écosystème. La station est aussi la maison de la réserve naturelle des Sept-Îles, toujours gérée par la lpo. Romain Morinière en est le directeur depuis un peu plus de trois ans. Ingénieur en environnement de formation, il a travaillé pendant sept ans dans un parc zoologique. L’envie de travailler dans le milieu de la conservation in situ, avec des espèces de faune locale, l’a conduit à postuler à la lpo. “Les valeurs de l’association, les animaux et la Bretagne… C’est un poste qui me faisait rêver.”
Il veille tout spécialement sur la réserve naturelle des Sept-Îles, en fait composée de… cinq îles majeures, et d’une trentaine d’îlots ! Sur cet espace, il y a une réglementation stricte : “Pas de chasse, pas de cueillette, on ne peut pas y faire de bivouac ni de feux. Et il est interdit d’y débarquer. C’est grâce à cela que nous avons toute cette richesse aujourd’hui. Les Sept-Îles, c’est un écrin en termes de patrimoine naturel.” Romain Morinière le rappelle : “L’unique colonie française des Fous de Bassan, le plus grand oiseau de mer d’Europe, se trouve sur l’île Rouzic, un des îlots de l’archipel. 98 % de l’effectif niché des macareux moines métropolitains se reproduisent sur la réserve et nous avons également la première colonie de reproduction du phoque gris : c’est là qu’il y a le plus de bébés phoques qui naissent tous les ans. Tout cela ne serait pas possible si toutes les îles étaient accessibles au débarquement.”
Ce travail de longue haleine est largement reconnu, comme en témoigne la décision ministérielle d’étendre la réserve de 280 hectares à 19 700 hectares dès cette année 2023. “Le but de l’extension de la réserve est de protéger un écosystème dans son ensemble, précise Romain Morinière. Aujourd’hui, c’était très axé sur le milieu insulaire et sur ce que l’on voyait sur les îlots, les phoques, les Fous de Bassan, et les oiseaux marins. On oublie parfois que s’ils sont là, c’est qu’il y a une richesse sous-marine, une ressource alimentaire qui est là, et que tôt ou tard, si on ne protège pas tout ce qui est sous l’eau, tous les individus qui en dépendent vont disparaître.” Le directeur l’assure : “L’idée n’est pas de mettre la nature sous cloche : les sorties plaisance et les kayakistes sont autorisés. Il s’agit de faire cohabiter tout ce monde-là intelligemment, même si c’est compliqué.” La lpo a obtenu qu’une petite zone de 1,3 km2 soit totalement préservée de tout passage d’avril à août. “C’est un moment important pour les Fous de Bassan : c’est à cette période qu’ils nichent et ils ont besoin de pêcher et également de repos.” Des bouées indiqueront la zone où il sera interdit de pêcher, de faire de la plaisance ou autre activité.
Pour ceux qui s’intéressent tout spécialement à ces oiseaux, la maison de la réserve offre une vue en direct, via un écran géant, sur l’île Rouzic où une caméra filme les Fous de Bassan. Des sorties en mer et des sorties nature sont par ailleurs organisées, avec un guide nature lpo. (…)