À Lanildut, dans le Finistère Nord, au bout du bout avant le grand saut vers les Amériques, la savonnerie Route Mandarine offre une escale sensorielle. Souvenirs de voyages, odyssées fantasmées, la promesse fonctionne !
Tiphaine Chalaron n’a pas suivi le cursus d’une grande école pour apprendre à confectionner, à faire connaître et à vendre ses savons. Néanmoins, elle a réussi à faire de sa petite entreprise une marque dont la notoriété profite de vents porteurs. La passion sans doute. Et l’envie de participer à la mise en valeur d’un artisanat local. Des motivations qui, dans un projet, aident à franchir de nombreuses barrières. Route Mandarine, située à Lanildut, dans le Finistère Nord, l’un des plus beaux coins du monde, c’est un peu tout ça à la fois. Le voyage sans les miles ni le supplément bagage mais avec une invitation à se jouer des frontières grâce à une escapade sensorielle pavée de clins d’œil mémoriels. Cap sur la garrigue du maquis corse, sur un marché aux épices du continent africain, sur le vestiaire d’un hammam marocain ou sur le parcours d’un chemin de randonnée réunionnais dont on n’avait pas mesuré la difficulté avant d’enfiler les crampons. Des histoires singulières qui ont en commun la nostalgique expérience d’une première fois” gravée dans le cerveau droit, celui qui emmagasine les émotions.
Première savonnière à froid du département
Des savonneries, en Bretagne, il y en a quelques-unes. Avec des histoires, des rencontres, des “déclics” qui font le sel des aventures entrepreneuriales. La promesse de Tiphaine est celle de l’évasion olfactive. La grande, la belle, celle qui vous décroche les narines et vous projette fissa dans les jupes d’une grand-maman qui sentait bon la fleur de monoï. Ce n’est pas une surprise, Tiphaine n’a pas eu une enfance bretonne même si les attaches familiales sont arrimées à celle d’un port finistérien. Née en Polynésie, une enfance épaules et pieds nus dans la chaleur moite d’une île dont on fantasme la beauté et les traditions séculaires. Les fleurs en colliers ; le tiaré à l’oreille pour tenir la mèche dorée par les alizés. À 12 ans, Tiphaine fait son entrée en sixième… à Quimper. Le dépaysement est brutal mais les racines sont puissantes. C’est une fille d’ici, de là-bas et d’ailleurs. Il n’était pas écrit que la baroudeuse serait un jour la première savonnière à froid du Finistère. Une pionnière qui aurait converti de nombreux disciples ? Embarrassée, elle fait la moue. Soizic, recrutée en 2019 pour accompagner le développement de la marque, affairée dans le laboratoire autour de cartons prêts à l’expédition, mime une génuflexion et ironise : “Oh oui, tu es notre gourou !” “Défricheuse d’un terrain jusqu’alors méconnu”, préfère alors celle qui se destinait au métier de sage-femme. (…)