C’est avec une grande émotion que j’entreprends d’écrire ce premier éditorial d’ArMen, tant cette revue m’a appris et donné.
La première fois que je l’ai rencontrée, c’était en 1986. Lycéen à Brest, je visitais un grand-oncle, ancien marin et abonné de la première heure au Chasse-Marée. Ma grand-tante m’avait alors montré une « nouvelle revue sur la Bretagne » et qui « était très belle ». C’était le premier ArMen et cette fameuse première Une, avec ce couple de Bigoudens et leur portrait de mariage. La grâce d’une photo de Michel Thersiquel !
Une quinzaine d’années plus tard, jeune journaliste, j’ai envoyé un Curriculum vitae à la rédaction. Sans trop d’espoir, jusqu’à ce jour d’octobre 1999, où, revenant d’un voyage, un message m’avait été laissé sur le répondeur me demandant si j’étais éventuellement intéressé par un emploi à plein temps pour écrire sur la Bretagne et faire des reportages dans les pays celtiques ; la revue cherchait quelqu’un… Le genre d’événement tellement heureux où l’on se pince trois fois pour bien comprendre que l’on ne rêve pas !
Évidemment, j’ai accepté, et je me souviens de ces premiers jours, lorsque, intimidé, je me rendais à l’Abri du marin, à Douarnenez. Le rédacteur en chef était alors Yves Labbé, l’un des créateurs de la revue avec Fañch Postic, et homme d’une immense culture. J’ai une pensée pour eux en écrivant ces lignes. Il y avait aussi Yvon Rochard, à la moustache rieuse et au talent d’écriture. Il y avait également cette virgule géante, héritée de l’écrivain Jean-Pierre Abraham lorsqu’il était secrétaire de rédaction de la revue…
ArMen fut pour moi une sacrée école de l’exigence ! Elle a aussi été une histoire d’amitié, particulièrement avec Yann Rivallain, devenu rédacteur en chef quelque temps plus tard et avec lequel j’ai eu la chance de travailler pendant plus d’une dizaine d’années. Des années d’écriture et de discussions passionnées sur la Bretagne et « l’archipel des rêves » des fondateurs d’ArMen, les pays celtiques.
Parti en 2012, je reviens donc avec l’immense honneur de reprendre les rênes de cette revue après Ronan et Patrick Tanguy, avec lesquels j’ai collaboré ces dernières années. Je ne vous cacherai pas que c’est un pari, tant les temps sont durs pour la presse écrite. Nous comptons d’ailleurs sur votre soutien.
Nous allons tout faire pour qu’ArMen reste ce titre de référence qu’on lit et qui nous étonne à chaque fois qu’on l’ouvre. Cette revue que l’on conserve et que l’on consulte pour des articles qui n’ont pas vieilli d’une ride, trente ans après ; parce que la Bretagne reste un monde à découvrir et à construire et qu’ArMen contribue à faire de notre richesse culturelle un festin de l’esprit !
Erwan Chartier-Le Floch



