Texte : Maël Daniel
Ne l’appelez plus base de sous-marins. Sur la presqu’île de Keroman, à quelques encablures de l’entrée de la rade de Lorient, vitrine muséographique de cette reconversion réussie, la Cité de la voile Éric-Tabarly a accueilli plus d’un million et demi de visiteurs depuis son ouverture en 2008.
En l’espace de vingt-cinq ans, le site de la base de sous-marins de Lorient a considérablement changé, dans sa physionomie d’une part, dans sa vocation d’autre part. La presqu’île de Keroman est désormais consacrée au nautisme et à la course au large en particulier. Figure de proue de ce nouveau chapitre de la culture maritime lorientaise, la Cité de la voile Éric-Tabarly, espace de découverte ludique de la voile sportive, a ouvert ses portes en 2008 et propose aux visiteurs de s’immerger dans les coulisses de l’univers de la voile océanique.
Petit retour en arrière. En 1997, face au séisme que représente le départ de la Marine française, la reconversion du site de l’ancienne base de sous-marins s’impose rapidement aux élus. Le maire d’alors, Jean-Yves Le Drian, pressent la professionnalisation à venir de la course au large, et la Ville investit peu à peu pour faire de Lorient une place forte dans ce domaine et exister entre Port-la-Forêt à l’ouest, et La Trinité-sur-Mer à l’est.
Des chantiers navals, des écuries de course, un centre de formation à la survie en mer, un autre dédié au métier de scaphandrier, un port à sec, mais aussi des musées, des restaurants, des cafés et même une salle de concert y sont aujourd’hui présents. Un autre bâtiment de la presqu’île attire tout de suite l’œil, la Cité de la voile Éric-Tabarly.
Un lieu né à la croisée des chemins
Au début des années 2000, la reconversion du site coïncide avec la création de l’association Éric-Tabarly, fondée après la mort en mer du marin français en juin 1998. Pour entretenir à la fois son souvenir et ses bateaux, les Pen Duick, l’association cherche le lieu ad hoc. Lorient, mais aussi Le Havre, Cherbourg, La Rochelle…, des appels du pied sont faits à plusieurs villes.
“La Ville de Lorient se dit que créer un lieu qui puisse à la fois permettre de faire vivre la mémoire d’Éric Tabarly, d’accueillir ses bateaux et plus largement d’être un centre d’interprétation et de vulgarisation autour de sujets qui font rêver, mais qui restent assez confidentiels, serait un moyen de donner envie aux Lorientais et aux touristes de revenir sur la BSM [base de sous-marins, NDLR]”, indique Jean-Marc Beaumier, directeur de la Cité de la voile depuis septembre 2008.
Lorient a de solides arguments à faire valoir, notamment historiques. C’est en effet aux chantiers de La Perrière, tout proches, que trois des Pen Duick ont été construits. “Surtout, Lorient avait à proposer à l’association un projet ambitieux que les autres collectivités n’avaient pas.” Ainsi, Éric Tabarly donne son nom à la Cité de la voile, à la fois espace muséographique, mais aussi siège de l’association éponyme qui trouve, dans le hangar intégré au bâtiment, un lieu où entretenir les bateaux dont elle a la charge chaque hiver.
Bornes tactiles, douches sonores, simulateur 4D, concours de winch…
Dans un bâtiment signé Jacques Ferrier, dont la structure légère tranche avec la masse imposante des blockhaus à proximité, la première partie de la muséographie est destinée à découvrir l’architecture navale, avec quilles et coques à taille réelle, maquettes de bateaux, tables tactiles de matériaux composites et bornes vidéo sur lesquelles des intervenants de luxe, à l’image de Loïck Peyron, nous expliquent les principes fondamentaux qui président à la construction d’un voilier.
De la sécurité en mer, en passant par l’énergie à bord ou encore l’avitaillement, tout le spectre de la vie en mer est ensuite détaillé. Dans un autre espace original, le visiteur entend le témoignage de plusieurs marins célèbres qui se confient, en mode tête-à-tête grâce à des “douches sonores”, sur leurs expériences de mer marquantes, insolites, heureuses ou malheureuses. Charles Caudrelier, Francis Joyon, Charline Picon, Philippe Poupon, Bernard Moitessier ou encore François Gabart, au gré de la muséographie, nombreux sont d’ailleurs les coureurs au large qui témoignent de leurs carrières sportives.
La dernière partie est plus ludique avec des manipulations en tous genres : un concours de winch, un bassin géant où, grâce à une soufflerie, les marins en herbe peuvent découvrir les principes de la navigation sur des modèles réduits, un simulateur 4D avec embruns en prime, un jeu vidéo Virtual Regatta géant et autres simulateurs de navigation divers et variés, le tout ponctué d’animations régulièrement proposées par les guides animateurs pour en savoir plus sur de multiples sujets. Au total, trois heures de visites en moyenne, entre manipulations ludiques et éléments muséographiques de fond, sans pour autant rogner sur la richesse des contenus.
Lire la suite dans ArMen n°267…


