Après avoir commencé sa carrière dans les bals populaires des Côtes-d’Armor, Pierrick Pédron s’est aujourd’hui fait un nom sur les scènes internationales du jazz, de Tokyo à New York. Retour sur un parcours étonnant.
Premiers contacts avec la musique
Les premiers souvenirs de musique de Pierrick Pédron, né en 1969 à Saint-Brieuc, remontent à sa plus tendre enfance. Ses parents, très pris par leurs occupations professionnelles, le confient la journée à une nourrice dont les filles l’initient aux Rolling Stones et aux Pink Floyd pendant que d’autres se font l’oreille à l’écoute de Chantal Goya ou de Dorothée. “Cet univers m’embarquait dans des histoires surréalistes, confie-t-il, avec ces pochettes énigmatiques et ces musiques délirantes.” Une découverte de sensations qui vont le submerger. Plus tard, c’est la rencontre de Georges Gouault, accordéoniste revenu à Hillion monter une école de musique après une carrière parisienne d’accompagnateur de Bourvil et d’Albert Préjean, qui va poser les rails de son futur itinéraire. Cette école locale engendre un véritable engouement auprès de parents qui n’imaginent pas leurs enfants sur les bancs du Conservatoire de Saint-Brieuc, institution un peu guindée, à l’époque, pour les familles des communes avoisinantes. Georges Gouault fonde également un ensemble choral, Les Enfants de la Presqu’île, auquel participe la famille Pédron et où le tout jeune Pierrick est chargé de donner les départs ! Tout naturellement, il apprend le solfège pendant que sa sœur s’initie à l’accordéon auprès de Georges Gouault. Le solfège ne saurait constituer une fin en soi et l’accordéon étant déjà le domaine réservé de sa sœur et de ses cousins, c’est un autre instrument qui lui est proposé. Son père venant de perdre un cousin, saxophoniste amateur, sa mère l’incite à reprendre le flambeau, d’autant plus que Georges Gouault donne également des cours de saxophone ! Un beau jour, le saxophone alto, un King Marigaux, commandé par ses parents, arrive à la maison. Pierrick s’en souvient encore : “Je sens encore l’odeur de la boîte quand je l’ouvre, je revois le tissu rouge de l’étui.” Son tout premier morceau, “Le travail c’est la santé” d’Henri Salvador, il doit bien évidemment le jouer lors des repas de famille, sous le regard de ses parents pas peu fiers. Puis d’autres chansons viennent élargir le répertoire de l’apprenti saxophoniste. La famille décide alors de créer un petit groupe de bal, L’Avenir d’Armor, qui agrémente les représentations de la chorale de Georges Gouault. Le groupe réunit sa sœur, sa cousine et quelques élèves. Pierrick profite rapidement du bénéfice de l’âge et devient la mascotte du groupe. Les bals se succèdent durant les années 1977 et 1978 dans la région briochine avec un répertoire axé principalement sur le musette et la variété, ce qui ne suffit plus à passionner le garçon.
Les bals périclitant, les envies d’ailleurs musical se précisent pour Pierrick Pédron dès les années 1980. Son mentor Georges Gouault lui a en effet proposé de venir entendre un groupe de jazz qui enregistre dans le studio qu’il possède. Le regard de l’adolescent se modifie. Il prend conscience des possibilités de son instrument et demande à son professeur quels saxophonistes pourraient l’intéresser. La réponse ne se fait pas attendre : “Il y a Don Byas, je l’ai entendu à Paris, mais pour l’alto, tu dois absolument écouter Charlie Parker !” Les parents lui achètent aussitôt un vinyle de la collection Il Grandi del Jazz, enregistrement pirate du Bird réalisé par un label italien. Mais l’écoute le déçoit fortement : “Ça ne m’a pas plu parce que je ne comprenais pas, il y avait des notes partout !” Et c’est avec la guitare électrique, qu’il a commencé à étudier parallèlement au saxophone, qu’il reprend le chemin des bals avec sa sœur et son beau-frère et quelques camarades en élargissant le répertoire au rock et au funk. En 1983, il participe à sa première Fête de la Musique à Saint-Brieuc avec le groupe Anecdote qui s’y taille un joli succès avec son rock progressif. Ses amis lui suggèrent alors de délaisser la guitare pour revenir au saxophone alto. Il accepte sans trop de regrets, l’instrument connaissant alors un nouvel élan grâce aux musiques de films et aux spots publicitaires. (…)