La Rando Muco, toujours sur le pont !
C’est aux confins du Trégor et de la Cornouaille qu’a lieu tous les ans l’un des plus importants événements sports nature de Bretagne. Ce n’est pas un hasard si la Rando Muco a fait souche à Belle-Isle-en-Terre. Rencontre avec une partie de l’équipe dirigeante, en pleine préparation de l’édition 2021, prévue pour cet automne… Une grande première !
Il pleut à verse et le thermomètre fait grise mine. Pas encore facile pour le printemps de se frayer son chemin, en dépit des jonquilles qui parsèment les talus. Les rues de Belle-Isle-en-Terre sont désertes, si ce n’est les quelques membres de la Rando Muco, réunis pour l’occasion. « On a déjà vu pire ! », lâche l’un d’eux en rigolant. « Une fois, on même eu de la neige pour la Rando ». Il est clair que les ponts du Léguer ont vu passer quantité d’eau depuis que l’événement a pris sa source en 1995 un peu plus loin, à Saint-Nicodème, à l’instigation de Daniel Bercot. « Mon fils Alexandre était atteint de la mucoviscidose. Je ne pouvais pas rester les bras croisés. Une fois lancé la Pierre Le Bigaut, une épreuve cycliste sur route, j’ai eu l’idée de proposer d’autres activités pour les VTT et les sports nature ». Il était alors grand temps de faire connaître cette maladie héréditaire dont le gène responsable n’avait été identifié que huit ans auparavant. A cette époque, les jeunes touchés par la muco étaient condamnés à une très courte existence : leurs capacités respiratoires limitées empêchaient beaucoup d’entre eux d’atteindre l’âge adulte…
S’unir pour vaincre la muco
Vulgariser la maladie, bien sûr, mais aussi soutenir la recherche ! Et en l’occurrence, l’argent est le nerf de la guerre : il faut collecter des subsides pour épauler les équipes scientifiques qui se dévouent à cette cause. Année après année, les milliers de participants rassemblés à Belle-Isle permettent de remonter plus de 120 000 euros par édition dans les caisses de Vaincre la Muco, à Paris. « On compte 7 500 malades dans l’Hexagone, mais leur densité est bien plus forte en Bretagne. C’est important que les sommes récoltées par nos soins soient réinvesties dans la région », explique Yannick Cornanguer, co-président de la Rando Muco. C’est ainsi que les travaux du professeur Férec, à Brest, et ceux du professeur Meyer, à Roscoff, ont bénéficié d’un coup de pouce. « Les choses avancent ! Même si les malades ne peuvent guérir, ils sont désormais à même de mener une vie professionnelle, de fonder une famille… », se réjouit-il. L’espoir vient ces dernières années des Etats-Unis où a été mis au point un traitement beaucoup plus efficace. Même si son prix très élevé ne permet qu’à peu de patients d’en bénéficier pour le moment, Yannick y voit un grand espoir : « nous voyons enfin le bout du tunnel ! »
Solidarité et convivialité
Ce n’est pas Maurice Prigent qui le contredira : « Quand on veut quelque chose, on cherche, et quand on cherche on trouve ! » assure l’ancien marin à la retraite. Cet habitant de Plounevez-Moëdec n’est pas peu fier d’avoir apporté sa pierre à l’édifice depuis le début. « Celui qui n’aide pas les autres se punit soi-même. Il faut que nous soulagions ces malades touchés par un problème qui les dépasse totalement. » La solidarité n’est donc pas un vain mot dans le pays de Belle-Isle : quelques 600 bénévoles concourent à préparer l’événement, et ce n’est pas le travail qui fait défaut tout au long de l’année ! Maurice, pour sa part, gère la signalétique des différentes circuits, et le choix ne manque pas : randonnées à pied, trails, raids VTT, à cheval… sans parler des repas servis dans le bourg. « Tout cela ramène beaucoup de monde à Belle-Isle, constate François Marrec, le maire. Passée la première fois, ils reviennent en famille car notre coin figure parmi les plus beaux. » La richesse du patrimoine local est incontestable : non loin du confluent du Guer et du Guic se trouvent le château de Lady Mond, l’église de Lokenvel ou encore la chapelle de Sainte Yuna… Mais surtout, le paysage ici n’a pas été saccagé : Koad an Noz et ses environs fourmillent de haies et de sentiers qui forment un véritable paradis pour les amateurs de sports nature.
Rendez-vous à l’automne
« Les gens trouvent ici quelque chose qu’ils ne trouvent nulle part ailleurs. C’est ici que réside notre culture, l’ADN du pays » s’enflamme encore Maurice dans son parler trégorois. La langue bretonne, encore parlée au quotidien, participe à la saveur de l’événement. « La musique aussi, et cela plaît ! » assure Ifig Kastell, l’un des sonneurs fidèles au poste. Il devra cette année mettre l’accent sur les concerts, puisqu’il ne sera pas autorisé de danser bras dessus-bras dessous. Pas de fest-deiz donc, et un événement reporté à l’automne pour ne pas être annulé comme l’an dernier. « Ce sera une première pour nous, nous ne savons pas du tout comment ça va se passer… » s’interroge Yannick Cornanguer. Si l’équipe reste inquiète, elle a mis la crise sanitaire à profit pour peaufiner plusieurs nouveautés. Ainsi, tous les circuits VTT ont été revus et un trail reliera La Roche-Derrien à Tréglamus en suivant le cours du Jaudy. Rendez-vous donc le 3 octobre prochain, « lorsque la moisson sera rentrée », rigole Maurice. Mais tant que la maladie ne sera pas vaincue, la Rando Muco continuera sa récolte !