Portrait Clara Diez

Clara Diez Márquez : une panderetera d’aujourd’hui

Asturienne pleine d’humour et d’énergie, Clara a vite appris le français, après avoir été étudiante à l’Université de Bretagne Sud, à Lorient. Par la suite, elle est devenue organisatrice, manager, barmaid, se trouvant à la tête de nombreux projets. Elle s’est aussi battue avec ses collègues intermittents au Grand Théâtre de Lorient pendant trois mois.

Une histoire de famille : le chant traditionnel

Son père musicien jouait de la cornemuse asturienne, la gaïta gaita. Il est venu plusieurs fois au Festival Interceltique : jury du MacCallan, responsable de la délégation asturienne, créateur de la première banda de gaitas (1982). Il était aussi luthier de tambours traditionnels, instruments plutôt destinés aux femmes : les pandereta. Il en a fabriqué huit à sa fille, dont celui qui illustre cet article, le plus beau ! Elle a chanté jeune sur scène pour accompagner un groupe de danses traditionnelles, habillé en costumes du XVIIIe siècle, et a suivi ce groupe en Argentine pour une tournée auprès des Argentins asturiens émigrés qui souhaitent apprendre leur langue, leur musique et leurs danses.

S’habiller autrement ? Changer la musique populaire ?

Clara a essayé de changer le regard sur le chant traditionnel des Asturies. Une tâche pas facile. Avec les Asturiens eux-mêmes, au Pavillon des Asturies, avec son nouveau groupe, elle avait choqué, chantant sans costume et avec des instruments qui jouaient de façon moderne, plus proche des techniques électroniques ou d’improvisation.  Mais Clara est têtue. Son groupe ne plaît pas ? Elle ne s’habille pas comme il faut ? Elle continue sa route. Venue souvent en Bretagne, elle a décidé d’y vivre : « ici, on accepte la recherche musicale, avec des musiciens de toutes influences, qui ont un très haut niveau ». Et elle y a poursuivi ses études (avec un Master sur la situation sociolinguistique de l’asturien), le chant, la danse. Avec son premier groupe, Amieva, elle chante en asturien, en fest noz, avec un violoniste, un batteur et un accordéoniste. Pachpi, laridés, kejaj, tout est possible ! Mais elle préfère reprendre la création, la recherche sur le chant à écouter avec le trio Muga.

Des projets plein la tête

Elle sait tout faire : assurer le backstage de l’Espace Bretagne depuis 2012 au FIL avec Thomas Moisson pour l’accueil des artistes, organiser des tournées pour elle et ses groupes, animer des formations, des stages… (43 dates en huit mois, malgré le confinement),  créer de nouveaux spectacles, les promouvoir, les diffuser… Elle prépare un spectacle solo avec l’accompagnement de Matéu Baudouin des groupes Artùs et la Novia dans le cadre d’une bourse de compagnonnage de la FAMDT. Elle a créé sa propre compagnie d’artistes :  L’Arca, avecMuga et bientôt d’autres. Elle est aussi militante très active des intermittents, s’investissant notamment dans l’occupation du théâtre de Lorient. Un peu déçue par le résultat, elle pense que ce mouvement a cependant créé des liens entre les artistes et montré l’importance d’une coordination efficace, comme à Nantes ou à Lannion. Féministe qui porte le chant des femmes des Asturies de toute sa voix, elle dénonce : « La mythologie folklorique autour de la panderetera est très forte, c’est une muse qui a un devoir de transmission et ce devoir l’empêche d’être artiste, de s’approprier son répertoire et de créer … On ne la paie pas alors qu’on paie un joueur de gaita « . Clara n’est pas d’accord :  » Un jour, j’ai refusé de chanter pour un bagad si on ne me payait pas. Le spectacle avait lieu le soir même. J’ai eu gain de cause ! « 

Clara est bien une pandereta d’aujourd’hui, une féministe des Asturies !

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