Alors que les médias régionaux et nationaux titrent “L’écotaxe* hérisse la Bretagne”, “Le combat contre l’écotaxe, la nouvelle gabelle, va continuer en Bretagne”, “La Bretagne sonne le tocsin”, alors que corps allongés, opérations escargot, propos rageurs et visages meurtris endeuillent les communes et font la une de nos journaux, alors qu’une “page catastrophique de l’histoire de la Bretagne” est sous nos yeux écrite, l’historien Joël Cornette relate, pour ArMen, 1 500 ans de “fureur bretonne”. Des offensives franques aux manifestations de Plogoff, en passant par les épisodes violents de contestation comme la révolte des Bonnets rouges ou torreben (casse-tête), selon Joël Cornette, auteur de l’Histoire de la Bretagne et des Bretons, “la Bretagne fut, pendant de longs siècles, dans une situation de guerre ouverte ou sporadique. En conséquence, le Breton se trouve toujours placé dans la position de l’adversaire.”

Résistance à la sujétion, soif de reconnaissance, fureur bretonne. Une fureur qui gronde depuis un demi-siècle et s’entend particulièrement depuis quelques mois à une vingtaine de kilomètres au nord-ouest de Nantes, dans les bois et le bocage de Notre-Dame-des-Landes. Et si la création d’un aéroport provoquait un appel d’air pour le développement du Grand Ouest, s’il était l’un des leviers essentiels du développement économique, de l’emploi, de l’attractivité et du rayonnement de la Bretagne ? Face à la saturation du trafic, aux nuisances sonores, les opposants brandissent le coût du projet, les dégâts environnementaux. Sur ce conflit, sur cette bataille, sur cette affaire qui a pris un tour national depuis que Jean-Marc Ayrault, l’ancien maire de Nantes, est devenu Premier ministre, Tudi Kernalegenn a mené l’enquête, a tâché de comprendre ce qui ressortait de ces tensions exacerbées, de leurs origines à leurs évolutions en passant par leurs excroissances.

Cette forme d’aménagement du territoire n’est-elle pas issue d’une vision des Trente Glorieuses, comme l’estime le géographe Jean Ollivro, privilégiant les grands projets plutôt que, de manière très rationnelle et méthodique, des ambitions peut-être moins spectaculaires, mais qui changent concrètement la vie des populations ?

Oui, dans une région, si l’on veut avoir une inscription internationale efficace, il faut un grand aéroport international. Mais la Bretagne compte déjà un aéroport à Nantes, à Brest, à Rennes. “Globalement, commente Jean Ollivro, il manque une véritable planification régionale intelligente. Rennes voulait son TGV, Nantes son aéroport et les deux projets sont totalement dissociés l’un de l’autre… Il faut des équipements effectivement lourds localement, mais qui sont des plates-formes d’interconnexion.” Alors le projet d’aéroport Notre-Dame-des Landes, objet miné ?

C’est d’une autre résistance dont il est question au cœur du dossier consacré aux maquis et à la Résistance. Une résistance qui prend un R majuscule. Une résistance multiforme qui fait frémir, lorsqu’on découvre des itinéraires valeureux qui finissent bien, mais qui peuvent aussi se terminer tragiquement, à la manière de la jeune lycéenne Anne Corre. Le journaliste et écrivain Roger Faligot a su retracer le cheminement d’une jeune fille au destin qui, de l’ordinaire, a basculé dans l’exemplaire. Les premiers maquis en Bretagne, c’était en 1943. Ils ont marqué les esprits. Ils ont marqué l’imaginaire collectif.

Chloé Batissou

* Le principe de l’écotaxe poids lourds a été adopté par le Parlement en 2009 à l’issue du Grenelle de l’environnement.

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